Jérusalem

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 Et je vis la Cité sainte, Jérusalem nouvelle, qui descendait du ciel, de chez Dieu,

 elle s'est faite belle, comme une jeune mariée parée pour son époux. J'entendis alors

une voix clamer, du trône : « Voici la demeure de Dieu

avec les hommes. Il aura sa demeure avec eux ; ils seront son peuple,

et lui, Dieu avec eux, sera leur Dieu.

Il essuiera toute larme de leurs yeux : de mort, il n'y en aura plus,

de pleur, de cri et de peine, il n'y en aura plus, car l'ancien monde s'en est allé. »

Alors, Celui qui siège sur le trône déclara : « Voici, je fais l'univers nouveau. »

Puis il ajouta : « Ecris : Ces paroles sont certaines et vraies. »

« C'en est fait, me dit-il encore, je suis l'Alpha et l'Oméga,

le Principe et la Fin 

Ap 21,2‑6

 

     

 

 

Presque toutes les grandes cités de l'histoire ont pour elles l'avantage d'un emplacement géographique particulier : montagne, fleuve, port, voie de communication, etc... En ce qui concerne Jérusalem, rien de tel. Elle na pas de fleuve seulement un petit cour d'eau, elle est loin de la mer, hors du tracé de la via Maris (grande route commercante entre l'Egypte et l'orient), et non pas sise au sommet d'un mont mais comme dit le psaume :

"Jérusalem des collines l'entourent!..."

 

Rentrons dans cette ville pour savoir ce qu'elle a comme avantage.

Commençons d'abord par une remarque historique : Jérusalem fut probablement fondé il y a 39 siècles! La ville d'alors n'avait bien évidemment pas les allures de celle d'aujourd'hui d'autant plus que la ville s'est étendue à plusieurs reprises mais fut tout autant réduite en ruines. Ce mouvement de construction et de démolition a fini par combler les ravins. L'aspect actuel peut donc sembler moins accidenté qu'au temps du Christ, de David, ou même d'Abraham. La première Jérusalem s'est d'abord constituée sur une avancée de terrain, connue comme la citée de David; nom de celui qui l'avait conquise pour en faire sa capitale. Au Nord, sur l'élévation appellée Mt Moriah, se trouvaient le premier puis le second Temple. Ce que nous voyons aujourd'hui du Temple, ne sont que les restes de celui d'Hérode le Grand construit (en -19), sur les restes du premier temple de Salomon (-960), brûlé par Nabuchodonosor (en 587), et partiellement reconstruit par Néhémie au retour d'exil (vers -445).

Commencer par le Temple c'est en fait se centrer sur le foyer d'où rayonne toute la vie de l'Ancien Testament, lieu sacré, parce que lieu de la 'shékinah', c'est à dire de la présence de Dieu!

Le Temple qu'a connu Jésus devait être flambant neuf, et l'on comprend l'attrait qu'il pouvait exercer sur le peuple, et de là vient le scandale d'annoncer qu'il n'en restera pas pierre sur pierre (Mt 24). Les pierres de fondation encore en place, et que l'on peut admirer du côté du mur occidental, font jusqu'à 500 tonnes! Voilà qui frappe l'esprit humain! Mais... avec le nouveau Testament se sont nos corps humains qui deviennent Temple de Dieu! A l'exemple du corps du Christ. (Jn 2,19-21)

 

     

 

Le pinacle du Temple peut être compris comme le sommet de la construction centrale ou encore l'angle sud-est du parvis car c'est qu'on a le plus grand dénivelé.

 

Avant de rentrer dans le Temple (entre la cité de David et les escaliers d'accès) se trouve toute une cité avec ses marchands et ses lieux de purification, ce qu'aujourd'hui on appelle l'Ophel. Une fois parvenu en contre-bas des murs du Temple, côté sud, on devait gravir, non sans émotion, les escaliers monumentaux qui introduisaient le pèlerins sur le parvis des païens.

Immense esplanade!  Le Temple est "cette place pour Dieu seul, non encombrée"[1]. Au 1er siècle pourtant, le Christ chasse les marchands du Temple. Que d'activités devaient donc se trouver là! On y changeait sa monnaie en sicle (monnaie spécifique au Temple), et on pouvait dès lors commencer ses offrandes. C'est aussi là que l'on pouvait consommer la part non brûlé des sacrifices de communion si le parvis des israélites était trop étroit. C'est là encore que se trouvait une foule d'infirmes comme le boiteux des Actes des Apôtres (Ac 3). Leur infirmité étant signe d'impureté, il ne leur était pas permis d'aller plus proche du Temple lui-même sur le parvis réservés aux juifs . Tout autour du parvis se trouvait une série de colonnades. A droite (côté Est) se trouvait le portique de Salomon sous lequel enseignait Jésus. C'est là en effet qu'enseignaient nombres de lévites et de maîtres de la Torah et des traditions.

S'avançant davantage on pouvait pénétrer par la 'belle porte' dans le parvis des femmes : première partie du parvis réservé aux juifs; puis au parvis des hommes au pied de nouvelles marches conduisant au Temple en lui même.

Devant la porte monumentale tout de marbre blanc, se trouvait l'autel des sacrifices. Alors enfin on remettait son chevreau ou son agneau à un prêtre afin de l'immoler au Seigneur. Si l'on était lévite on pouvait pénétrer dans 'le Saint', c'est à dire la première pièce du Temple, tandis que seul le grand prêtre pénétrait une fois l'an dans la seconde salle : le Saint des Saints! (Ainsi en fut-il pour Zacharie, le père de Jean-Baptiste - Lc 1)

 

  

 

Autour du Temple la Tradition a placé ce qui s'y rapporte. Ainsi en est-il du tombeau de la Vierge Marie. On trouve aussi son lieu de naissance. Marie est liée au Temple à plus d'un titre. Elle est de famille sacerdotale, elle aurait passée une partie de son enfance au Temple, et puis surtout, elle est la Mère de Dieu! Or nous venons de le dire le Temple est le lieu choisit par Dieu pour demeurer parmi les hommes. La mère de Dieu ne pouvait donc pas en être très éloignée. Cependant, cela ne doit pas contredire l'autre lieu de naissance de la vierge à Zippori, ni le lieu de sa dormition au Cénacle (ouest) et à l'autre bout de Jérusalem (est). Ne nous effrayons pas de ces différentes traditions, cherchons plutôt ce que chacune d'elle veut dire sur le Mystère; par exemple Marie sera célébrée en un lieu comme le couronnement de la création dans un autre comme 'sede sapiente' (Trône de la Sagesse), ou en un autre comme La Fille de Sion (nom de la colline sur laquelle est construit Jérusalem), ou encore comme la Nouvelle Arche d'Alliance.

 

        

              "plonger sans savoir nager aurait été un suicide!"

 

Nous avons parlé du boiteux présent sur le parvis mais de nombreux autres n'avaient pas même accès au parvis! L'infirme de Bezatha (=Béthesda = Bet-Hesed = maison de la grâce), en Jn 5, est ce grabataire qui attend le bouillonnement des eaux de la piscine qui se trouve juste au nord du Temple. Cette piscine alimentant le Temple en eau. En effet l'activité liturgique et sacrificielle nécessitaient beaucoup d'eau, purifications, nettoyages des sacrifices d'animaux. On connaît bien cette piscine aujourd'hui au pied de la basilique sainte Anne. Cette piscine était remplie par d'autres plus en amont et devait bouillonner à cause du jeu des siphons règlant l'aduction.  Une fois guéri par Jésus, le grabataire ira, selon l'ordre de Jésus, dans le Temple se montrer aux prêtres. Là il témoigne et affronte même les critiques des juifs. Il semble qu'il soit aussi guéri de toutes peurs ou enfermements. Jésus a fait ce miracle à cet endroit non par hasard... Adjoint à la piscine on a retrouvé un temple à Esculape le dieu romain soignant les psychopathes. Les esclepeïa cherchaient à redonner le moral aux malades et à les sortir de la logique de la maladie. Ce que vient de faire Jésus est en même temps un vrai témoignage de qui est le vrai Dieu des psychopathes. Plus que restauré dans sa chair, l'infirme a aussi gagné en force morale.

 

        

 

En prenant la rue qui longe le Temple au nord on monte jusqu'au point culminant occupé par la forteresse Antonia. Elle a disparu au profit d'un arc de triomphe du temps d'Adrien  auteur de la Destruction du Temple en 135. C'est à ce moment que la ville est réorganisée à la romaine. On perce des rues et même un cardo (axe urbain romain typique). La plupart sont encore repérables aujourd'hui. Beaucoup de pierres sont réemployées dans les reconstructions. Chez les Soeurs de Sion on trouve outre l'arc d'Adrien des pierres gravées pour "le jeu du roi" (Un prisonnier est choisi comme roi, il a tous les droits, mais à la fin du jeu il doit mourir!). Ces pierres se trouvait en dans les salles des gardes de la forteresse, sans doute le lieu de la couronne d'épine et de la flagellation du Christ, étape qui allait le mener à la mort!

 

        

 

Aujourd'hui, en allant toujours vers l'ouest, on continue de traverser le quartier arabe. De musulman il devient de plus en plus chrétien, bien que les deux cohabitent. Si nous suivons la via dolorosa, qui va dans cette direction nous aboutissons au Saint Sépulcre."Le Saint Sépulcre, le lieu le plus saint du monde pour les chrétiens. Il renferme toute la souffrance de Jésus jusqu'à sa Résurrection. Le Tombeau de Jésus est autorisé aux visites puisqu'il est vide depuis 1973 ans! L'attente pour ce pélerinage peut-être longue, mais on ne peut s'empêcher de prier."[2]

 

        

 

     

 

Le Saint sépulcre c'est aussi le lieu de la crucifixion. En effet on sera surpris de trouver, à droite en entrant, un escalier qui mène au Golgotha. Difficile d'imaginer une colline verdoyante bordant la ville de Jérusalem et pourtant, la chapelle d'aujourd'hui recouvre le lieu où fut crucifié notre Seigneur Jésus-Christ. Ainsi en moins de 50m et sous un même toit se retrouve ces deux plus éminents lieux chrétiens, que sont ceux de la Mort et de la Résurrection du Christ... comme pour nous dire que ces deux mystères sont indissolubles.

 

A l'extrême ouest de la ville se trouve une autre forteresse qui fut sans doute plus confortable que la première. C'est là qu'aurait résidé le préfet romain : Pilate.

Ce qui nous intéresse en tant que pèlerin c'est aussi la partie Sud-ouest de la ville, baptisée par les croisées 'Nouvelle Sion', au point que la tradition juive y a placé le tombeau de David fondateur de la royauté en Sion. Mais nous sommes, là, à deux pas du Cénacle, lieu de l'institution de l'Eucharistie. De la maison du 1er siècle où le Christ à célébré la Cène, il ne reste rien de visible. Nous visitons aujourd'hui une 'chambre haute' qui n'est autre que la chapelle croisée (XIIè s.) portant sur son flan droit une Mihrab (niche orientée vers la Mecque, et d'où l'on conduit la prière) des temps mamelouk.

 

 

En revenant vers l'Est, on aura l'impression de sortir de la vieille ville or on tombera (à St Pierre en Gallicante) sur un escalier qu'a probablement emprunté le Christ en revenant emprisonné du Jardin des oliviers (un peu plus à l'Est). Cette partie de la ville était au 1er siècle intra muros et plus précisément dans le quartier des familles sacerdotales et bourgeoises. Non Loin de là les fouilles des années 60 ont fait apparaître de grandes maisons juives du 1er siècles portant encore les marques de leur destruction par le feu! (peut-être en 70 et certainement en 135)

 

 

 

Puisque nous avons parlé du jardin des oliviers allons-y. En passant nous traversons la cité de David avec à son pied la piscine de Siloé alimentée par un tunnel de 580m de long, daté du VIIIème siècle av JC! En effet sous d'Ezéchias La capitale du nord, Samarie, est tombée aux mains des assyriens et les réfugiés arrivent en masse à Jérusalem. Cette expansion maximale de la Ville réclamait un surplus d'eau, ou tout au moins de protéger ses sources comme celle du Gihon à l'origine de ce tunnel.

Arrivé dans la vallée du Cédron (à sec) nous trouvons le domaine de Gethsémani, propriété d'un pressoir d'huile, traitant le fruits des oliviers alentours. C'est là que venait Jésus avec ses disciples. Le Lieu de l'agonie de Jésus est situé à 'un jet de pierre'.

En remontant la pente du mont des oliviers, on arrive au lieu du Dominus Flevit, c'est à dire l'endroit retenu pour se souvenir de la grande lamentation de Jésus sur Jérusalem (Lc13,34). Le lieu offre en effet une superbe vue sur Jérusalem. Au plus haut se trouve l'Eglise de l'Ascension. Aujourd'hui tenue par des musulmans (elle a du être une mosquée en son temps), il n'en reste qu'un petit pavillon octogonal protégreant la roche sur laquelle on est sensé reconnaître la trace du pied de Jésus...

 

 

Ce petit parcours dans la Ville de la Paix (YeRu ShaLaïM), qui nous a fait croiser de nombreux siècles, est à l'image de cette ville unique. A Jérusalem il y a comme une contraction du temps. "Jérusalem où tout ensemble ne fait qu'un". Tout a eu lieu ici. "Jérusalem, Jérusalem, toi qui tue les prophètes!..." Aimer cette ville n'est donc pas si facile, mais pourtant si pressant...

Ps 121  (122)

[1]Paul BEAUCHAMP in D'une montagne à l'autre, La Loi de Dieu, Seuil paris 1999 p.33.

[2]Pierre PAZIMI, in "Ma visite en Israël" dans Eglise de Pala (Tchad) N° 132, Mars 2004.